Créatine : favorise la performance, mais pour qui?

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Au cours de la dernière décennie, l’utilisation de suppléments alimentaires chez les athlètes a augmenté à tous les niveaux. À cet égard, la créatine est l’un des suppléments les plus connus et les plus utilisés. Rien qu’aux États-Unis, le chiffre d’affaires brassé annuellement par la vente de ce supplément dépasse les 400 millions de dollars. La créatine est connue pour améliorer les performances sportives dans certaines situations. Mais il existe aussi des cas où il vaut certainement mieux ne pas en utiliser, surtout dans les sports où le poids corporel est un facteur crucial de la performance. Malgré de nombreuses recherches scientifiques, l’efficacité de ce supplément est encore incertaine dans de nombreuses situations sportives...

Naturellement présente dans notre corps, la créatine est une substance produite dans le foie, les reins et le pancréas (± 1 à 2 grammes par jour). Par ailleurs, nous absorbons aussi chaque jour une petite dose de créatine par le biais de notre alimentation, en particulier via la viande et le poisson. La créatine contenue dans le corps est stockée à raison de quelque 95 % dans les muscles. Afin qu’elle puisse se maintenir dans les muscles, la créatine est d’abord liée à une molécule de phosphate ; c’est ainsi que se forme la substance appelée phosphocréatine (ou phosphate de créatine), une source d’énergie importante – sinon la plus importante – pour les efforts intenses de courte durée, par exemple les « sprints ».

Cependant, ce système d’énergie ne peut répondre que durant quelques secondes aux besoins énergétiques importants, après quoi les stocks de créatine se retrouvent épuisés. C’est à partir de ce constat qu’est née l’idée qu’une plus grande quantité de créatine dans les muscles permettrait sans doute d’améliorer les performances sportives. Ainsi, les athlètes russes utilisaient déjà cette substance dans les années 1970, partant du principe que son utilisation augmenterait leur réserve musculaire de phosphocréatine.

Dans les années 90 surtout, de nombreuses recherches scientifiques ont été menées sur le rôle de la supplémentation en créatine dans la performance sportive et la récupération après l’effort. De fait, les résultats de ces études ont indiqué que les suppléments de créatine peuvent augmenter légèrement la quantité de phosphocréatine dans le muscle. Il s’ensuit une légère amélioration potentielle des performances pendant les efforts maximaux inférieurs à 30 secondes. Il a ainsi été démontré que les sprints (pour la course et la natation) sont plus rapides et que les performances des sauts en hauteur peuvent augmenter.

Cependant, l’effet indirect de la créatine sur l’amélioration de la performance semble encore plus important. En effet, l’utilisation à long terme de suppléments de créatine permet d’augmenter la réserve d’énergie disponible pendant les périodes d’entraînement musculaire intensif (de type power training). Grâce à la prise de créatine, il est possible d’effectuer davantage d’exercices répétés impliquant des charges plus lourdes. Il en résulte un gain d’entraînement supplémentaire, notamment grâce à l’accroissement de la masse et la force musculaires. En fin de compte, ces avantages devraient améliorer les performances lors des compétitions, du moins dans les compétitions où la masse et la force musculaires sont cruciales. En outre, l’utilisation de suppléments de créatine assure une récupération musculaire plus rapide entre des efforts intenses de courte durée ; elle peut même accélérer le rétablissement de la masse et la force musculaires après une blessure musculaire.

Toutefois, la prise de créatine ne présente pas seulement des avantages pour les athlètes, elle peut aussi avoir des effets indésirables. La prise de créatine entraîne souvent une accumulation de liquide dans les muscles, ce qui entraîne chez certains athlètes – mais pas tous – une prise de poids considérable pouvant parfois atteindre plusieurs kilos sur une période de seulement quelques semaines. Il ne s’agit donc pas dans ce cas d’un apport de muscle, mais d’eau... Cela peut non seulement affecter les muscles, qui « gonflent », devenant ainsi plus raides et plus fragiles, mais la prise de poids exerce aussi une influence négative sur les performances dans de nombreux sports. Chez les coureurs, les kilos en plus vont réduire l’efficacité de la course, chez les cyclistes, un gain de poids exigera une puissance accrue (watts) dans les montées, chez les nageurs, il réduira la flottabilité, et le sauteur en hauteur ne voudra en aucun cas hisser ces kilos supplémentaires au-dessus de la barre fatidique... Bref, la créatine n’est pas une panacée pour tout le monde, au contraire.

Mise en œuvre pratique

Pour accroître la quantité de phosphocréatine dans les muscles dans le but d’obtenir les effets précités, il est nécessaire de suivre le protocole adéquat. Ce protocole consiste à prendre 3 grammes de créatine par jour pendant 8 à 12 semaines. Idéalement, la créatine sera prise immédiatement après un effort, et en même temps qu’une collation ou qu’une boisson riche en glucides et/ou en protéines. Bien que l’utilisation à long terme de suppléments de créatine n’entraîne pas d’effets nocifs, il est conseillé, après un usage prolongé, d’arrêter les suppléments de créatine pendant quelques semaines afin d’éviter toute accoutumance. Il est en outre souvent recommandé de débuter une période de supplémentation en créatine par une première semaine à haute dose, par exemple 4 x 5 grammes par jour. Cette procédure réduit effectivement la durée du « chargement » de la créatine, qui passe d’environ 3 semaines à 1 semaine, mais l’augmentation rapide simultanée du poids corporel est souvent perçue comme un point négatif par les utilisateurs. Mis à part le fait que le chargement de la créatine est certes un peu plus rapide, cette procédure ne présente cependant aucun avantage par rapport à la procédure lente (3 grammes par jour).

En résumé

La créatine est sans nul doute un complément efficace, mais uniquement pour les athlètes qui pratiquent des sports explosifs impliquant des efforts de courte durée et/ou qui veulent tirer un bénéfice maximal de leur entraînement musculaire intensif. Pour que le supplément agisse comme il se doit, une dose quotidienne de 3 grammes pendant 8 à 12 semaines est nécessaire. En corollaire, n’oubliez pas que la prise de créatine s’accompagne inévitablement d’une prise de poids de 1 à 1,5 kg – et souvent plus – ce qui représente un inconvénient dans certains sports.

Références