Les antioxydants: amis ou ennemis? - Partie 1

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Durant l’effort, les mitochondries, ou « centrales énergétiques » des muscles, produisent un grand nombre de « radicaux libres oxygénés ». Ces substances sont produites à chaque fois que des atomes d’oxygène, utilisés durant l’effort aérobie, capturent un électron supplémentaire. L’oxygène (O2) devient alors une molécule « agressive » pour la cellule et provoque un phénomène connu sous le nom de stress oxydatif.  Notre organisme dispose certes d’un système de défense propre contre le stress oxydatif, à savoir, les enzymes antioxydantes présentes dans les cellules musculaires, qui dégradent de façon efficace les radicaux libres oxygénés. Toutefois, il est fréquent que la production des radicaux d’O2 dépasse les capacités du système de défense. Il apparaît donc utile d'emblée de mettre en place un processus de défense complémentaire, qui passe par la prise de compléments : ce sont les « antioxydants ».

Il existe différents types d'antioxydants. Les enzymes antioxydantes présentes dans nos muscles ne peuvent fonctionner correctement qu'en présence d’une quantité suffisante de plusieurs minéraux, tels que le cuivre, le sélénium et le zinc. C'est la raison pour laquelle la présence de cuivre, de sélénium et de zinc est encouragée, en tant que substances antioxydantes, dans divers compléments alimentaires. Or dans la réalité, un déficit en ces minéraux est rare, même chez les athlètes de haut niveau. Les antioxydants les plus puissants se retrouvent dans les plantes, qui ont besoin de ces substances (vitamines et composés phytochimiques) pour se protéger du rayonnement UV. Le corps humain ne produit pas lui-même de vitamines, et donc pas non plus de vitamines à action antioxydante, comme les vitamines A, C, E ainsi que l’acide folique. Par ailleurs, citons également la coenzyme Q10, une substance qui joue un rôle comparable à celui d'une vitamine. Toutefois, contrairement aux autres vitamines, la coenzyme Q10 est produite en quantité suffisante par notre organisme. Enfin, citons également les composés phytochimiques, dont les principales catégories sont les caroténoïdes, les flavonoïdes et les polyphénols. Les études scientifiques montrent que la prise orale d’antioxydants permet en effet de réduire le stress oxydatif.

La prise d’antioxydants est dès lors particulièrement en vogue chez les sportifs. Leur utilisation est encouragée en vertu du fait « qu’il est important de se protéger durant l’effort contre les lésions musculaires provoquées par le stress oxydatif’ ». La consommation d’antioxydants permettrait d'améliorer les prestations mais aussi d'accélérer la récupération. Mais est-ce réellement le cas ? Un programme d’entraînement consiste en effet toujours en une succession de deux étapes : éreinter l'organisme (phase d’entraînement) pour ensuite le reconstruire (phase de récupération). Lorsque l'on parle de progression, cela signifie que le bénéfice obtenu durant la phase de récupération est supérieur aux lésions occasionnées lors de chaque entraînement. Toutefois, les lésions musculaires survenant lors de l'entraînement sont et demeurent le stimulus indispensable pour garantir une adaptation à l’entraînement. Pour le dire simplement : « NO PAIN, NO GAIN » (pas de douleur, pas de bénéfice). Or, si l’on examine l’utilisation des antioxydants pendant l’entraînement, c'est justement à ce niveau que le bât blesse. En effet, les lésions musculaires dues au stress oxydatif sont probablement un mal nécessaire vers une amélioration, or l’amélioration est justement ce qui vous motive à vous entraîner. Des études récentes ont démontré que pour un même niveau d'entraînement, les personnes qui combinent leur entraînement d'endurance avec la prise de vitamine C et de vitamine E progressent moins. Ceci s'applique également à la prise de Coenzyme Q10. Durant les périodes où vous souhaitez améliorer votre condition physique, la prise d'antioxydants n'est donc certainement pas indiquée, bien au contraire, car elle aura plutôt tendance à freiner votre progression. Les antioxydants sont-ils dès lors complètement superflus pour les sportifs ? Non, pas nécessairement. Après avoir investi des efforts dans un entraînement visant à développer votre condition physique, vous voulez un retour sur cet investissement, autrement dit des performances optimales. C’est ici que les antioxydants pourraient intervenir. Si vous souhaitez réaliser plusieurs performances importantes d'affilée, vous pouvez probablement limiter les lésions musculaires, et ainsi récupérer plus vite, grâce à la prise d'antioxydants. Par exemple, est-il recommandé de prendre des antioxydants à l'approche d’un Tour de France ? Non. Mais pendant le Tour ? Oui. De fait, récupérer rapidement entre les étapes constitue la clé du succès dans le cadre d’un grand tour. Dans cette situation, il faut viser à limiter autant que possible le degré de lésions musculaires lors de chaque étape. Un coureur qui ambitionne un bon classement au palmarès ne participe pas à un grand tour pour s'entraîner, mais pour réaliser des performances en continu, ce qui sous-entend de pouvoir récupérer au maximum d’un jour à l’autre. Dans cette optique, les antioxydants pourraient donc avoir une utilité. De nouvelles études doivent toutefois confirmer cette hypothèse.  

En résumé : l’utilisation quotidienne d’antioxydants est à déconseiller durant la phase de progression de l'entraînement. En revanche, les antioxydants peuvent contribuer à une meilleure récupération durant une période où le sportif participe à des compétitions se succédant à un rythme soutenu. Dernier point important : la prise d'antioxydants via l’alimentation ordinaire, à savoir sous la forme de fruits et de légumes, ne pose naturellement aucun problème, au contraire : elle constitue un élément essentiel d’une alimentation saine et variée.    

Peternelj, T, Coombes, JS. Antioxidant supplementation during exercise training : beneficial or detrimental? Sports Medicine, vol 41(12), p 1043-1069, 2011

Powers, S, Radak, Z and Li Ji, L. Exercise-induced oxidative stress : past, present and future. The Journal of Phsyiology, vol 594, p 5081–5092, 2016.